pour un engagement fort en faveur de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes dans les secteurs des arts et de la culture.
Dans le cadre des prochaines élections municipales de mars 2020,
l’association HF Normandie qui agit en faveur de l’égalité entre les femmes et
les hommes souhaite interpeller les candidates et les candidats sur ces enjeux dans
les secteurs des arts et la culture.
HF Normandie a été constituée en avril
2011 à l’échelle de la Normandie et a contribué à la création de la Fédération
interrégionale du Mouvement HF dont elle est membre.
Elle se donne pour but
le repérage des inégalités entre les hommes et les femmes dans les milieux de
l’art et de la culture et la mobilisation contre les discriminations observées
dans le but de favoriser l’égalité réelle, la parité et la mixité.
Elle agit en faveur
des droits professionnels et veille à la juste représentation des créatrices,
des œuvres, des idées et des revendications des actrices de la vie culturelle
en incitant à ce que ce débat soit ouvert dans l’espace politique et public.
Après 10 ans de mobilisation, nous constatons que l’égalité Femmes-Hommes
dans les arts et la culture, stagne et parfois même régresse !
Le temps est venu de l’action ! C’est dans ce sens qu’à l’initiative des représentant·e·s de la Fédération du Mouvement HF siégeant au Haut Conseil à l’Égalité (HCE), un rapport a été remis en février 2018 aux autorités publiques intitulé : « Inégalités entre les femmes et les hommes dans les arts et la culture – Acte II : après 10 ans de constats, le temps de l’action ».
Si c’est par le secteur de la culture qu’est arrivée, ces dernières années,
la vague de mobilisation et de dénonciation inédite des violences faites aux
femmes, c’est que les inégalités entre les femmes et les hommes y sont particulièrement
flagrantes. Majoritaires sur les bancs
des écoles d’arts, les femmes disparaissent avec le temps :
• 97% des groupes programmés par les grands festivals de musique sont
composés exclusivement ou majoritairement d’hommes ;
• 85% des expositions-hommage
dans les grands lieux d’exposition sont dédiées à un homme ;
• 72% des avances sur recette du Centre national du
Cinéma vont à des projets menés par des hommes ;
• depuis sa création il y a 70 ans, le festival de
Cannes a décerné 1 palme d’or à une femme ;
• aucune femme ne dirige un théâtre national ou l’un
des 7 Centres nationaux de création musicale ;
• le Panthéon compte 4 femmes et 72 hommes ;
L’État comme certaines collectivités territoriales se sont déjà engagés
dans une démarche d’éga-conditionnalité, en prévoyant des malus financiers pour
les organisations qui ne feront pas progresser la place des femmes dans leur
programmation et leur direction, selon des objectifs chiffrés à définir.
Cette démarche, promue par le Haut
Conseil depuis 2014, repose sur l’idée que les financements publics – 20
milliards d’euros par an dans le secteur de la culture – ne peuvent alimenter
des pratiques inégalitaires. Les
communes sont les premiers financeurs de la Culture en France. Elles disposent
dès lors, y compris au regard de leurs compétences, de leviers d’actions pour
agir en faveur d’une meilleure
répartition et d’une plus juste équité.
Le Mouvement HF encourage à aller plus loin pour opérer un changement
d’échelle. La démarche d’éga-conditionnalité des financements pourrait être
généralisée à l’ensemble de la politique culturelle et l’ensemble des enjeux
relatifs à l’égalité femmes-hommes, c’est-à-dire :
- au-delà de la programmation : en amont, à l’accès aux aides à la
création et en aval, à l’accès aux récompenses (nominations,
distinctions, etc.) ;
- à la question de l’image des
femmes dans les productions culturelles, avec des objectifs chiffrés pour
lutter contre les représentations dénigrantes, dégradantes ou violentes des
femmes ;
- à la question de la mémoire
de la contribution des femmes à l’histoire des arts – ce que l’on appelle le
« matrimoine ».
En effet, notre héritage culturel commun
est composé de notre Patrimoine (ce qui vient des pères) et de notre Matrimoine
(ce qui vient des mères). En réhabilitant la notion de Matrimoine et les femmes
qui le composent, le Mouvement HF souhaite valoriser la mémoire des créatrices
et intellectuelles en contribuant à la transmission et à la visibilité des
œuvres de celles qui nous ont précédées. Il s’agit aussi de faire émerger et de
construire notre matrimoine à venir, en permettant de reconnaître les artistes
contemporaines. Il s’agira dès lors de réunir les Journées Européennes du Patrimoine et du Matrimoine, comme
un seul et même évènement sur nos territoires pour transmettre un héritage
culturel commun plus égalitaire à nos générations futures.
De manière complémentaire, accompagner la sensibilisation aux
stéréotypes de sexe pour l’ensemble du secteur et demander à toute
organisation percevant des financements, de communiquer sur les numéros
d’écoute et d’orientation pour les victimes de violences (3919 notamment).
Pour y parvenir, il faudra en passer par la déconstruction de la notion
de talent, aujourd’hui critère absolu de sélection, trop souvent présenté
comme naturel, alors qu’il est le fruit d’une construction sociale.
En raison du sexisme, les femmes ne reçoivent pas la même formation, n’ont
pas accès aux mêmes réseaux ni aux mêmes moyens pour créer une œuvre, ne
disposent pas du même temps pour préparer une exposition ou pour répéter.
« On ne nait pas génie, on le devient », disait Simone de Beauvoir. A
moyens égaux, le talent le sera aussi !
Pour sortir de ce constat d’immobilisme une vingtaine de recommandations (à
retrouver en détails dans le rapport du HCE) ont été formulées pour créer
un environnement favorable à une politique culturelle intégrant pleinement l’objectif
d’égalité femmes-hommes, parmi lesquelles :
- Renforcer les personnes-clés et les
dispositifs de l’égalité femmes-hommes au sein de l’architecture administrative ;
- Instaurer, pour toutes les structures
culturelles percevant des subventions publiques,
des objectifs chiffrés obligatoires de
progression (part des femmes parmi les bénéficiaires des fonds publics,
image des femmes dans les productions culturelles soutenues par des fonds
publics, part des femmes dans la politique mémorielle), jusqu’à atteindre une
répartition égale ;
- Intégrer la démarche de l’éga-conditionnalité aux financements publics alloués
par les collectivités territoriales et aux cadres contractuels existants (conventions
d’objectifs et de moyens ou de performance, conventions pluriannuelles de
gestion, cahiers des charges, lettres de mission adressées par les tutelles aux
directeur·trice·s de tous les établissements publics et subventionnés,
etc.). Prévoir des indicateurs relatifs
à la place des femmes artistes parmi les artistes impliqué·e·s à toutes les
étapes de la production culturelle ;
- Prévoir des indicateurs relatifs à l’image des
femmes dans les productions culturelles
et réaliser un guide « Qu’est-ce qu’un projet culturel non sexiste ? » à
diffuser largement.
Prévoir des objectifs chiffrés de progression concernant la part des femmes et
des hommes représenté·es ainsi que l’image des femmes, pour l’ensemble des
bénéficiaires de fonds publics ;
- Mettre en œuvre et assurer le suivi des
dispositions garantissant l’égal accès des
femmes et des hommes aux fonctions de direction d’établissements publics dans
l’ensemble des secteurs de la culture ;
- Étendre à l’ensemble des organisations
bénéficiant de fonds publics l’obligation de
mettre en place, pour le recrutement du ou de la dirigeant·e, une procédure de
sélection assurant l’égalité de traitement des candidat·e·s et assurant une
présélection d’un nombre restreint de candidat·e·s, prenant en compte le
respect du principe d’égal accès des femmes et des hommes. Veiller à la parité
dans tous les conseils d’administration, commissions et jurys ;
- Développer des travaux de recherche
nécessaires à la réhabilitation de la place des
femmes artistes dans l’histoire des arts ;
- Réhabiliter la contribution des femmes à
l’histoire des arts dans les dispositifs de
valorisation de l’héritage national existant, en fixant des objectifs chiffrés
de progression jusqu’à parvenir à l’égalité dans la mesure du possible
(monuments consacrés à la mémoire des femmes ayant lutté pour les droits des
femmes, noms de rues et de bâtiments, programmes scolaires et d’examen, œuvres
acquises par les musées, etc). Développer des initiatives visant spécifiquement
à rendre visible la contribution des femmes à l’histoire des arts ;
- Prévenir les violences sexistes et sexuelles
dans le milieu culturel et artistique et
accompagner les victimes.
A l’heure où l’omerta sur
les violences sexistes et sexuelles faites aux femmes et sur la culture du viol
dans les arts et la culture commence enfin à se lever, le Mouvement HF exige
des actes des pouvoirs publics et apporte son soutien à toutes les paroles de
victimes qui dénoncent ces violences.
Les élu·e·s de nos communes doivent eux aussi se saisir de ces problématiques et agir pleinement à leur niveau.
L’égalité entre les femmes et les hommes est un combat qui nécessite d’agir à tous les niveaux, en faveur d’une société plus juste et plus démocratique, soucieuse de ne pas discriminer la moitié de notre Humanité.
L’association HF Normandie souhaite que les
candidat·e·s aux prochaines élections municipales intègrent ces enjeux à leurs
programmes. Il en va de la responsabilité de chacun et chacune d’agir à son
endroit.